Après la crise, que restera-t-il de nos dispositifs de communication ?

Par Jeanne Camuset, Directrice conseil

L’impact économique de la crise sanitaire sur le monde de la communication fut retentissant. Au plus fort de cette crise, les investissements médias ont baissé de 70 %. Pour les entreprises, ces changements, profonds ou superficiels, ont en commun d’être souvent improvisés. A l’heure où s’esquisse un retour à la normale, dressons un premier bilan : le secteur s’interroge sur ses usages et sa transformation digitale. Un vent nouveau souffle sur la communication.

Certains ont tout arrêté, d’autres ont ajusté leurs dispositifs ou en ont profité pour modifier structurellement leur stratégie de communication. Pour faire face à la crise planétaire, les marques ont dû brusquement changer de modèle et s’adapter à de nouveaux comportements, notamment digitaux.

Face à l’appétence grandissante des consommateurs pour la vidéo en live – dans la sphère privée comme professionnelle –, le direct a fait une entrée fracassante dans l’univers de la communication. En format vidéo ou audio, il s’est fait une place de choix en quelques mois seulement sur la majorité des plateformes existantes : LinkedIn, Facebook, Twitter, Instagram, TikTok, Twitch… Pour les marques, ces directs représentent une opportunité rêvée d’échanges authentiques et de fidélisation de leur communauté. C’est ainsi que sont nées des applications dédiées, comme Clubhouse, star montante de la Silicon Valley, qui conjugue live et échanges audio. On y parle à l’infini de tous les sujets et on peut s’y connecter à n’importe quelle heure.

Sur le plan de la communication corporate, on a vu les entreprises organiser des webinars à tout-va afin de conserver le lien forgé avec leurs audiences. Les marques ont osé des contenus bruts et sans fard, prendre le risque des conversations en direct avec leurs followers… et elles s’en sont plutôt bien sorties. Cet exercice nouveau leur a permis de renforcer leur engagement et de faire émerger une relation de proximité. Appelés à perdurer sous une forme nouvelle sous peine d’indigestion (plus courts, plus visuels, plus rythmés…), ces webinars s’installeront dans les dispositifs et viendront compléter des formats de réflexion au long cours, comme les livres blancs.

Les gagnants de la crise

Si la majorité des marques avaient posé depuis longtemps une stratégie d’engagement et de proximité avec leurs audiences, celles qui ont émergé pendant la crise sont celles qui mettent en valeur leur quête de sens. D’ailleurs, 56 % des consommateurs français souhaitent que les entreprises prennent position sur des valeurs sociales, environnementales. Les entreprises ont un rôle central à jouer pour répondre aux défis sociétaux et environnementaux à venir. Les consommateurs l’ont bien saisi et exigent un changement. Ils leur demandent de prendre position. Sur ce terrain, Accor, Airbus, Boulanger, Carrefour, LVMH ou La Poste ont su tirer leur épingle du jeu. Dove a ainsi créé une campagne baptisée « Courage is beautiful », qui montre des soignants portant des masques. Quant à Intermarché, il a remercié « tous les héros discrets » de cette crise sanitaire. Ces entreprises ont su faire preuve d'empathie et leur ligne éditoriale s’en est trouvée durablement modifiée.

Inventer un récit collectif

Livrer des récits engagés, inclusifs, authentiques… constituera à l’avenir le principal défi collectif pour le secteur de la communication. Aux entreprises d’apporter des solutions pour construire une nouvelle vision de la consommation et de la société, plus coopérative, plus solidaire, plus proche des clients. Elles vont devoir partager de nouveaux récits pour construire ensemble un monde nouveau. Ces récits devront néanmoins continuer à répondre à des impératifs de performance. Se réinventer, certes, mais avec une exigence accrue en termes de ROI. Toutes les marques devront objectiver leurs actions et l’impact de leurs contenus sur leurs audiences. La crise que nous traversons représente probablement un des bouleversements les plus importants de l’histoire de la communication contemporaine.

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