Le slow media contre la dictature du flux

Court et vite. A l’heure de l’instantanéité triomphante, ces adjectifs

Par Thomas Nardone, co-fondateur et Directeur associé d'Ultramedia

Court et vite. A l’heure de l’instantanéité triomphante, ces adjectifs s’imposent dans les rédactions des médias du monde entier. Une vraie course à l’information rendue possible par les progrès technologiques, qui permettent de diffuser texte, image et son en une fraction de seconde. Mieux que Twitter et ses 140 caractères, la tendance est à Vine et à ses vidéos de 6 secondes maximum !

Du matin au soir, nous sommes assaillis par un flot d’informations diffusées en flux tendu sur nos radios, nos télés, nos smartphones, nos boites mail… Impossible ou presque d’y échapper. Et il faut bien reconnaître qu’il est parfois tentant de se prendre au jeu. Qui n’a pas suivi les sinistres attentats du 11 janvier seconde par seconde sur un écran ?

Mais ce sprint sans fin pose le problème du traitement de l’information. D’un média à l’autre, on retrouve souvent la même info, sans angle spécifique ni analyse de fond. Quand ce n’est pas tout simplement la dépêche AFP reprise intégralement, sans aucune vérification au préalable. L’annonce par erreur de la mort de Martin Bouygues nous a récemment rappelé ce triste fonctionnement.

Contre cette dictature du flux, certains médias et certaines marques n’hésitent plus à mettre le pied sur le frein. Ils font preuve d’innovation et d’audace pour inventer une nouvelle forme de journalisme, baptisée le « slow media », où l’on se permet de prendre du recul sur l’information pour mieux l’analyser, la décrypter et la mettre en scène. Un vrai luxe qui permet de se différencier de la masse.

DES MÉDIAS DE TEMPS LONG

La preuve ? La success story du groupe So Press, qui édite les magazines So Foot, So Film, Pédale… Et depuis début mars, le quinzomadaire Society, qui s’appuie sur les ingrédients qui font le succès des autres titres : la volonté de raconter de belles histoires, des sujets originaux, des angles décalés, un ton volontiers impertinent. Bref, ce magazine apporte une bouffée d’oxygène à ses lecteurs.

Le print n’a pas l’apanage du « slow media ». Loin de là. Car le digital permet d’inventer de nouveaux formats éditoriaux. Le site Ulyces.co édite chaque jour des webdocs, où le récit est habilement construit autour de textes, de vidéos et de photos. Le site de L’Équipe s’y met aussi à travers ses reportages « Explore ».

Ces médias de temps long pourraient utilement inspirer les marques, depuis qu’elles sont devenues elles-mêmes productrices d’informations. Plutôt que de créer des contenus sans aucune originalité, elles devraient chercher un positionnement, un angle et un ton qui les distinguent de leurs concurrents.

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