La culture économique des salariés doit être une priorité de la communication interne

Sujet trop souvent négligé au sein des organisations, la culture économique des salariés serait pourtant un levier efficace pour agir à la fois sur leur engagement et sur la performance de l’entreprise.

Arnaud Saint Jean, Directeur Conseil

Dans les nombreuses entreprises que nous accompagnons sur leurs enjeux de communication interne, le constat est le même depuis plusieurs années : interrogées sur leurs attentes en matière de communication interne, les équipes évoquent très souvent un besoin de clarté sur la stratégie et l’état de santé de l’entreprise.

Au-delà des plans à 5 ans marketés en interne autour de concepts parfois surannés comme Horizon, Cap ou Ambition 2030, les collaborateurs réclament une vision claire de la direction prise, des choix pour l’atteindre et de la santé économique de leur entreprise. Pourtant, à les interroger plus précisément, peu d’entre eux sont capables de répondre à des questions économiques concernant leur société. Quel est le chiffre d’affaires ? Quelle différence entre celui-ci et la rentabilité de la société ? Une croissance plus faible qu’espérée en fin d’année est-elle synonyme de perte d’argent pour l’entreprise ? Des emplois sont-ils donc en danger ?

Un déficit de culture économique qui réduit les clés de lecture

S’il existe peu de chiffres qualifiant le niveau de culture économique et financière au sein des entreprises spécifiquement, le sujet a déjà été étudié à une échelle plus large.

En 2014, un baromètre réalisé par la Chaire des Banques Populaires Vulnérabilité Financière et Microfinance d’Audencia* concluait que les Français sont encore loin de maîtriser des notions économiques et financières aussi essentielles que basiques pour gérer leur budget. À la même époque, une enquête menée par l'institut d'études BVA montrait que près de la moitié (42%) des personnes interrogées étaient incapables d’effectuer un calcul d'intérêts simple**.

En quoi est-ce problématique, à l’échelle des collaborateurs ? La compréhension des notions économiques et financières de base est une clé de lecture essentielle pour aborder nombre de sujets relatifs à l’entreprise - de sa stratégie à ses résultats - et donc, aussi, aux répercussions sur sa situation de salarié.

La culture économique, facteur facilitateur d’engagement

À l’heure où l’engagement des équipes apparaît comme une priorité stratégique, comment négliger les sujets de compréhension économique ? En considérant l’entreprise comme un collectif embarqué autour d’un projet commun, comment envisager la solidarité du groupe alors qu’une partie de ses membres ne dispose pas des clés de lecture pour savoir si le projet est viable ou non ; pour en comprendre les choix et la performance. Comment accepter des restrictions budgétaires – ou au contraire des investissements massifs – sans en saisir le sens économique ?

La communication interne doit se saisir du sujet économique

En 2009, l’institut BVA a interrogé 400 personnalités du monde politique, économique et médiatique sur la culture économique des Français***. Panel qui s’est montré particulièrement critique quant au rôle défaillant des entreprises, 71% considérant que les chefs d’entreprise devraient porter cet effort de pédagogie en priorité.

Les directions de la communication interne ont évidemment un rôle clé à jouer dans ce travail d’information. Au-delà de porter la voix de l’entreprise et de nourrir le collectif en valorisant les équipes et les réussites, les stratégies de communication interne devraient davantage inclure des sujets de compréhension économique et financière. En ne se limitant pas aux traditionnels rapports d’activité et financier de fin d’année dans les grands groupes. Les outils à disposition et les nouveaux formats éditoriaux facilitent la pédagogie et l’incarnation autour de ces sujets, dans une animation qui doit se penser tout au long de l’année.

L’ambition n’est évidemment pas de faire de chaque collaborateur un DAF en puissance. Mais, a minima, de permettre aux équipes de comprendre et traduire des résultats qui, sans explications, sont vides de sens ; comprendre la situation et le contexte de l’entreprise ; la situer dans son univers concurrentiel ; donner du sens à certaines décisions stratégiques ; analyser les mécaniques de rémunération, d’intéressement. Les armer, aussi, de connaissances précieuses pour monter en compétences et gagner en efficacité dans le cadre de leurs métiers. Et donc servir la performance de l’entreprise. Les entreprises ont ainsi tout à gagner à ce que leurs salariés maîtrisent mieux ces sujets essentiels. Car c’est dans le flou et les incompréhensions que naissent les doutes.

À une époque où les salariés demandent justement toujours plus de sens, l’enjeu est capital.

 

*https://www.lesechos.fr/idees-debats/cercle/linculture-economique-un-danger-pour-notre-democratie-132845

** https://www.lemonde.fr/argent/article/2014/02/06/la-culture-financiere-des-francais-laisse-a-desirer-et-la-votre_4361014_1657007.html

*** Étude réalisée auprès de 400 leaders d’opinion politiques (parlementaires et élus locaux), économiques (chefs d’entreprise, présidents de CCI, membres de la direction des principaux syndicats) et médiatiques (journalistes et présidents d’agences de communication et de publicité).

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